Expulsion / évacuation des bidonvilles : 25 ans de politiques coûteuses et inutiles.
La Fondation participe à la campagne d'interpellation des pouvoirs publics sur les bidonvilles en Ile-de-France qui regroupe déjà une quinzaine d'associations.
Le mal-logement touche aujourd’hui en France 3,5 millions de personnes. La « résurgence des bidonvilles » en est l’une des dimensions.
Les bidonvilles proposent des conditions sanitaires extrêmement précaires et même parfois dangereuses. Cet habitat de relégation se traduit également par une grande difficulté d’accès à des droits pourtant fondamentaux : difficulté de scolarisation des enfants, difficulté à obtenir une domiciliation, accès à l'eau minimal, voire empêché, refus de la mise en place du ramassage des déchets, prise en charge sanitaire et sociale avant tout assumée par des associations caritatives faute d’accès aux soins, aux services sociaux, etc…
Cette dimension est niée par les pouvoirs publics français qui, depuis 25 ans, pratiquent une politique systématique d’expulsion des habitants des bidonvilles.
Ces dernières années, cette pratique s’est intensifiée et les habitants vivent au rythme des expulsions (tous les 3 à 4 mois en moyenne).
19 676 personnes dans 577 bidonvilles
En mars 2015, la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées (la DIHAL) recensait sur le territoire français 19 676 personnes concernées et 577 « campements illicites » - le terme de bidonville étant soigneusement évité.
Ce phénomène est plus aigu sur certains territoires : l’Ile-de-France concentre à elle seule 37 % des personnes et 27 % des « campements », ce qui représente 7 000 à 8 000 personnes.
Ces lieux de vie font l’objet de traitements particulièrement peu respectueux du droit et de la dignité des habitants de ces terrains par les pouvoirs publics : entre indifférence et répression, laisser-faire et expulsions ou évacuations brutales, ces populations parmi les plus reléguées se voient traitées avant tout comme des indésirables.
Plus de 2600 de ces habitants ont été expulsés de force par les autorités au cours du premier semestre 2015.
Les bidonvilles de ces 25 dernières années concernent des populations et des trajectoires de vie individuelle très différentes : les travailleurs saisonniers du Sud de la France, les personnes sans domicile fixe du bois de Vincennes, les habitants de la Jungle de Calais, les cabaniers de l’Hérault, les migrants d’Europe Orientale (Roumains, Bulgares, Roms ou non, par exemple), etc.
Ces derniers concentrent clairement l’attention politique et médiatique. À présent, une parole clairement discriminatoire semble s’être libérée contre cette population cachant ainsi un phénomène global.
Cette politique est coûteuse. Une étude de cas récente montre que les évacuations successives subies par un même groupe de personnes ont coûté près de 400 000 euros (FMSH, Rapport MigRom, 2015).
Au-delà du coût social et économique, cette politique court-termiste a sacrifié une génération d’enfants.
De nombreux enfants vivant en bidonville ne sont pas scolarisés, suite aux refus des mairies de les inscrire.
Nous voyons ainsi les municipalités empêcher leurs propres habitants de sortir de la précarité des bidonvilles.
25 ans, c’est une génération sacrifiée. Combien en faudra-t-il encore ?
Face aux mêmes constats d’échecs, les associations intervenant en Ile-de-France ont décidé d’interpeller les pouvoirs publics et de dénoncer 25 ans de politiques coûteuses et inutiles d’expulsion des bidonvilles. Elles demandent ainsi qu’une véritable politique soit à nouveau engagée pour combattre cette précarité dans le respect des personnes.
Elles entendent atteindre plusieurs objectifs :
- Reconnaître l’existence des bidonvilles
- Obtenir un moratoire sur les expulsions des habitants de bidonvilles
- Monter des projets alternatifs vers des solutions pérennes
- Mettre en place une politique concrète de résorption des bidonvilles