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400 000 enfants sans domicile fixe en Europe

La Fondation et la Fédération européenne des organisations nationales travaillant avec les sans-abri (Feantsa) présentent aujourd’hui leur 9e Regard sur le mal-logement en Europe.

L’Europe est manifestement confrontée à un défi majeur : dans cette région parmi les plus prospères du globe, environ 400 000 enfants vivent à la rue ou dans des centres d’hébergement. La situation est particulièrement alarmante au Royaume-Uni où plusieurs dizaines de milliers d’enfants sont pris en charge avec leur famille dans les dispositifs d’hébergement d’urgence.

« Cela fait un moment que de nombreuses associations de différents pays nous alertent sur ce sujet et nous souhaitions faire la lumière sur cette problématique de façon la plus concrète possible. Nous avons exploité toutes les données que nous pouvions avoir – elles sont hélas peu nombreuses – et avons examiné également les conséquences du sans-abrisme pour les enfants et leur devenir », précise Sarah Coupechoux, responsable Europe à la Fondation Abbé Pierre.

En Allemagne, la dernière enquête statistique en date révèle que plus de 28 % des personnes vivant dans des structures d’accueil et d’accompagnement sont mineures. En France, les derniers chiffres disponibles font état de plus de 1 500 enfants à la rue. À ces enfants sans domicile s’ajoutent ceux et celles vivant dans des conditions de logement inadéquates.

Dans l’Union européenne, un quart des mineur·e·s – et plus d’un cinquième des enfants de moins de 6 ans – vivaient dans un logement surpeuplé en 2023. Les jeunes sont très nettement surexposé·e·s au problème : à titre de comparaison, le taux de surpeuplement parmi la population globale était de 17 %. Cette même année, près de 14,5 millions de jeunes européen·ne·s habitaient un logement présentant des signes d’insalubrité (infiltrations, fondations humides, moisissures).

En dix ans, la part des ménages pauvres avec enfants occupant ces logements a augmenté de plus de moitié en Espagne (+55 %), à Malte (+57 %) et en France (+65 %). Plus de 5 millions de ménages étaient en situation de précarité énergétique – soit 11 % des familles européennes. Cette situation concernait en moyenne presque un quart des ménages avec enfants vivant sous le seuil de pauvreté, et plus de deux familles en difficulté économique sur cinq en Grèce (+40 %), en Bulgarie (+42 %) et à Chypre (+55 %).

Cette situation inacceptable est doublement préjudiciable pour les enfants : non seulement les multiples dommages consécutifs du sans-abrisme ou des mauvaises conditions de logement affectent leur vie présente, mais elles entraveront aussi potentiellement leur trajectoire et leurs chances futures.

Vivre à la rue, entre deux hébergements temporaires ou dans un logement inadapté représente un danger pour la santé physique et mentale des enfants. Ces problèmes de santé sont souvent d’autant plus graves qu’ils ne sont pas toujours pris en charge, l’absence de logement représentant un obstacle de taille à l’accès aux soins.

Par ailleurs, les mauvaises conditions de logement peuvent avoir des conséquences sur l’apprentissage et une incidence notable sur les résultats scolaires. Le surpeuplement a des conséquences sur l’acquisition de la lecture, la mémoire à long terme et la capacité d’attention. Plus grave encore, les obstacles à la scolarisation demeurent nombreux pour les enfants sans-abri : l’absence de domiciliation peut compliquer les inscriptions, les expulsions compromettent la continuité des parcours scolaires.

Seuls de profonds changements structurels permettront d’enrayer le sans-abrisme et le mal-logement des enfants : revalorisation des salaires et des transferts sociaux, régulation du marché du logement et plafonnement des loyers, production de logements abordables à destination des familles, élargissement et rénovation des parcs de logements sociaux.

Parallèlement, différentes mesures, déjà expérimentées et mise en œuvre en Europe, peuvent être généralisées pour répondre aux besoins immédiats des enfants sans domicile : repérage des situations d’exclusion liée au logement, mesures préventives afin d’empêcher les expulsions locatives et les pertes de logement, adaptation des lieux d’accueil, développement des services intégrés et formés à l’accompagnement des familles, production de logements abordables situés dans des environnements adaptés.

Protéger les plus vulnérables

Le nouveau plan pour le logement abordable évoqué par la présidente de la Commission européenne doit s’adresser en priorité aux ménages les plus vulnérables, notamment les personnes sans domicile, et prioriser la production de logement non spéculatif, public, coopératif et social.

Les mesures qui seront engagées dans ce cadre devront nécessairement s’accompagner de politiques publiques cohérentes, notamment concernant la régulation des marchés privés du logement.

Les institutions européennes doivent lutter plus efficacement contre la pauvreté et protéger les publics les plus vulnérables sur les marchés du logement contre toutes les formes de discrimination basées notamment sur le genre, l’orientation sexuelle, la nationalité, l’origine réelle ou supposée des personnes.

Elles doivent notamment élaborer un plan d’action européen visant à mettre progressivement fin aux campements roms marginalisés d’ici 2030, en s’appuyant sur les recommandations du Conseil portant sur l’égalité d’accès des Roms à un logement adéquat et la lutte contre la ségrégation des campements.

Il s’agit en outre de protéger les enfants et les jeunes du sans-abrisme et du mal-logement en renforçant les garanties européennes qui leur sont consacrées.

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